mardi 9 décembre 2008

Lettre ouverte au Président de la République

Lettre ouverte au Président de la République








Monsieur le président,






Pourquoi Mayotte n’est-elle pas un paradis fiscal ? Ne serait-ce pas ce que nous pourrions en faire de mieux ? Nous vivons avec Andorre et Monaco, pourquoi pas Mayotte ?

Qu’est-ce qui va nous coûter le plus cher, qu’est-ce qui va nous rapporter le plus, qu’est-ce qui va nous causer le moins de souci, un département de plus ou un paradis fiscal de plus ?

Qu’est-ce qui empêche que Mayotte devienne un paradis fiscal ?

Département, pas département, maintenant pas maintenant. Voilà déjà un premier débat bien engagé.
Département ou paradis fiscal ; voilà un autre débat. Pas engagé du tout. Et pourquoi pas ?

Ce serait quoi les inconvénients d’un paradis fiscal ?

De grâce, Monsieur le Président, demandez qu’on me réponde.




Je vous assure de mon profond respect


Marcel Séjour

samedi 6 décembre 2008

Les Chinois sontils des wazungu comme les autres? (suite)


Quand l’Européen contemple la Nature il sait qu’elle lui a été donnée pour qu’il en soit le maître, pour qu’on y puise ce qui nous est utile ou agréable. L’on doit remercier Dieu pour ces infinies abondances, Le louer pour tous ces bienfaits et tenter de reproduire la Nature c’est une façon d’honorer Dieu. L’humilité va donc de soi parce que si on prend Dieu comme maître ce n’est pas gagné d’avance et on va passer beaucoup de son temps à se dire qu’on n’y connaît rien.
Quand l’Européen dessine il cherche à retrouver quelque chose qu’il a vu et que personne d’autre n’a vu. Il montre alors une partie de la Nature. Il le fait du mieux parce que son dessin doit honorer Dieu. L’artiste européen sera besogneux et facilement coupable de n’avoir pas fait suffisamment.



Quand le musulman contemple la Nature il sait que Dieu l’a mise à sa disposition. Il la subit donc dans ce qu’elle a de désagréable, comme tout un chacun et en jouit sans entraves. Il ne va pas essayer de copier ce que Dieu a fait (pourquoi pas rivaliser avec Lui tant qu’on y est ?)
Quand le musulman dessine ou calligraphie il n’est pas préoccupé par la Nature mais par celui qui l’a faite. Sous son crayon ou son pinceau les formes que lui proposera la Nature se simplifieront, se « géométriseront » et se répèteront tandis que leur ensemble, leur « communauté » se complexifiera à l’extrême. Le rythme alors seul compte, ossature de la psalmodie, propice à la prière ou tout au moins à l’abandon et de là à la soumission, premier article de la foi. Son dessin doit servir Dieu. L’artiste musulman sera besogneux et soumis, y compris à ses limites, qui ne le culpabiliseront jamais.




Quand le Chinois contemple la Nature il voit tout ce que Dieu a laissé à l’humanité en même temps qu’il sait que Dieu ne peut ni être joint ni appréhendé. La Nature appartient à la sphère de l’Humain ; pas Dieu. Comprendre la Nature c’est comprendre la façon dont l’univers fonctionne. Et l’Homme avec lui. Et se comprendre soi, ce qui n’est pas rien mais ce n’est pas comprendre Dieu. Expliquer la Nature c’est d’abord la prendre toute entière avec ses biens et avec ses maux.
Quand le Chinois dessine il explique la Nature, la simplifie, trouve dans les fouillis qu’il a sous les yeux les harmonies qui rendent la Nature compréhensible. Il y cherchera des équilibres, premiers symptômes de compréhension, puis des harmonies, véritables preuves que quelque chose d’important a été compris dans le fonctionnement de l’univers et de soi-même. Son dessin doit servir les hommes. L’artiste chinois sera besogneux et fier.


Quand l’Africain contemple la Nature il sait qu’il n’est pas différent d’elle ni elle de lui. Et comme Dieu est partout ce que Nature veut Dieu le veut. Comprendre le fonctionnement de la Nature a moins d’importance que comprendre ce qu’Elle veut. Avoir un objet qui l’évoque déclenche chez l’individu tout un faisceau de projections qui seront autant d’informations sur le rapport qu’il entretient avec l’œuvre divine. Le ressenti a alors valeur de connaissance.
Quand l’Africain dessine il le fait en relief ; il fabrique un objet qui évoquera ou servira à évoquer la nature mais ne la copiera jamais. En outre, représenter la Nature n’est pas très valorisant ; c’est montrer au monde qu’on n’est pas aussi bon qu’Elle, c’est se forcer à bégayer. Il est où l’intérêt ?
Ses objets serviront d’intermédiaires avec le sacré ; l’artiste africain sera besogneux et utile.


Et notre Comorien là dedans, à la croisée des chemins africains et arabes, méprisera la représentation et privilégiera l’utile. Nous voilà bien.

La façon dont une société appréhende l'art correspond à la façon dont elle appréhende la Nature, laquelle correspond à la façon dont elle appréhende le divin. On n'est pas sorti de l'auberge!
Les profs d'arts plastiques servent-ils à quelque chose?
Les profs d'arts plastiques doivent-ils être présents à Mayotte?

Si j'étais responsable de l'enseignement de l'art pictural, à Mayotte ou aux Comores en général je crois que je commencerais par renvoyer chez eux tous les profs d'arts plastiques européens pour les remplacer par des artistes chinois.

(à suivre...)

mardi 2 décembre 2008

épilogue au barrage. Photo d'Ibrahim


Monsieur Daoud Zitouni demande; "qu'est-ce qui est arrivé à l'agitateur mzungu après qu'il ait bloqué la rue comme un vulgaire instituteur mahorais?"
C'est une bonne question.
Il a été emmené au poste de police et là il a dit bonjour à tout le monde puisque tout le monde ou presque le connaissait pour l'avoir rencontré sur et en dehors des terrains de foot. Les policiers ont rédigé une main courrante, laquelle a du courir suffisamment loin pour ne pas être rattrappée. La plus embêtée de tous était la femme policier qui , sans doute la plus inquiète, surveillait les alentours et tirait la tronche quand elle a sali ses rangers en portant le malfaiteur. C'est ainsi.
D'autres questions se posent:

-Les instituteurs, entre autres mahorais, bloquent de temps à autre les rues, certes, mais est-il arrivé une fois qu'un Mahorais fasse un barrage à lui tout seul? L'a-t-on jamais vu?

- Un mahorais seul, dans ce genre de réclamation, aurait-il obtenu aussi rapidement tout ce qu'a obtenu ce mzungu, même "bien connu des services de police"?

-Enfin, et peut-être surtout, le niveau de ras le bol des mahorais et des wazungu est-il le même? Combien d'innondations supplémentaires aurait-il fallu au mahorais moyen de la rue Babou Salama pour qu'il s'allonge dans la boue?

Kamar et Ibrahim, mes autres voisins, ont pris la pelle pour bloquer la rue, et ont donc vu leurs noms portés sur la main courrante, mais ils ne se sont pas joints au "sit-in" d'Olivier. Ont-ils manqué d'audace? D'habitude individualiste? De confiance en eux? parce qu'après tout les wazungu partent et les mahorais restent. Victimes des mêmes insuffisances administratives Kamar et Ibrahim ont soutenu la révolte du mzungu mais se sont arrêtés à la "représentation publique" Pas question pour eux de se donner en spectacle, ce qu'Olivier, pourtant d'habitude fort discret n'a pas craint de faire. Avec sa pelle à la main, érigée comme un drapeau, il évoquait vaguement Jeanne d'Arc tombée de son cheval et souriante à son infortune. Dans quel imaginaire est-il allé puiser la forme de sa revendication? Et quel imaginaire a conduit les réactions de Kamar et d'Ibrahim?

lundi 1 décembre 2008

épilogue

Eh bien non, il ne s'agit pas d'une oeuvre d'art, même éphémère, et le grand lieutenant de police en a l'air sincèrement désolé mais c'est comme ça. Il s'agit d'un barrage routier, à la suite d'une énième inondation de boue dans les maisons de la rue Babou Salama, dont celle de mon voisin Kamar, (à droite, en marcel bleu) ce qui explique l'acharnement de son fils, Ibrahim, à pelleter la terre, et ce qui explique aussi la fureur d'Olivier qui a décidé de faire un barrage à lui tout seul. C'est donc Mick qui a gagné.
Les policiers n'ont pas beaucoup aimé devoir se salir les brodequins mais il a bien fallu débarrasser la route et ils ont emmené Olivier au poste.
Dans l'après midi les services de la mairie venaient constater les dégâts et entreprenaient de déboucher le caniveau.La SOGEA s'est installée ce matin et la rue est cassée, creusée, la canalisation est remise en état, bref tout va bien. Sans doute jusqu'à la prochaine grosse pluie. Il aura fallu trois inondations, autant de réclamations auprès des services ad hoc et ce mini barrage aux maxi effets.
Merci à Olivier pour ce beau geste.
Je le remercie d'autant plus volontiers que j'ai été moi-même innondé et que je n'ai pris ni la pelle ni la peine de me vautrer dans la boue. Je n'ai fait que prendre les photos.