mardi 27 décembre 2011

travaux de rentrée




je peins sur les murs de mon voisin et sur le mur de l'école en ce moment. Je m'emmerde un peu à travailler seul chez moi sur des petits formats. J'aimerais bien gagner ma vie en peignant des grands formats en plein air et ainsi laisser murir en atelier les tableaux les plus originaux et les plus élaborés.
Le portrait est celui de la femme d'un ami.

vendredi 18 novembre 2011

Friands de mabawas


Pendant la grève un hebdomadaire d’informations locales avait souligné, à l’attention de ses lecteurs fraichement arrivés sur l’île que les « mabawas » sont le nom indigène donné aux ailes de poulet , lesquelles viennent par conteneurs entiers des surplus d’abattoirs bretons ou brésiliens et sont vendues congelées par cartons de 10 kilos pour pas cher du tout. Si on veut manger de la viande moins chère que le mabawa on est obligé de manger son propre chat ou d’attraper sa chauve souris. Le ou la journaliste avait ensuite précisé que les Mahorais en étaient friands. « Friand », s’il faut en croire le dictionnaire se dit de celui « qui recherche avidement ». Qui ne peut pratiquement pas s’en passer ; les Mahorais sont donc friands de mabawas comme le maki l’est de bananes, comme le métro l’est de camembert, comme DSK l’est de mapuka. Au mieux un accro, au pire un drogué.
D’ailleurs dans les mêmes pages du même journal un long complément d’enquête avait été réservé à une nutritionniste qui, statistiques en main, constatait douloureusement que le mabawa lambda était composé d’environ quatre vingt pour cent de trucs pas bons du tout pour le cœur, le foie, les reins, le pancréas, des sucres par exemple, et des graisses aussi, surtout des graisses, presque 80% de graisses, rendez-vous compte et c’est à se demander si les Mahorais et Mahoraises savent exactement ce qu’ils mangent avec une telle avidité. Surtout que lorsque la graisse est grillée c’est encore pire ! Au mieux on doit leur pardonner parce qu’ils ne savent pas ce qu’ils font ; au pire on a à faire à des rustauds fiers d’une malbouffe qui ne peut trouver grâce ni auprès du bon goût ni auprès de la science. C’est surement pas à Neuilly qu’on mangerait des horreurs pareilles. Mais on est à Mayotte et à Mayotte c’est comme ça.

Il y a dix-sept ans de cela, encore jeune, encore mince, encore hyper actif, et ignorant encore de l’orthographe même du mot « cholestérol », entraineur de l’équipe de foot de Bandraboua, j’avais convié les responsables du club à discuter de la saison à venir autour d’un gigot de mouton que j’avais moi-même préparé, piqué à l’ail, parsemé de morceaux de beurre, cuit au four pendant longtemps à feu pas trop vif, arrosé tous les quarts d’heure de son jus de cuisson, accompagné de ses pommes de terre. Douze ans d’expérience de cuisinier derrière moi pour arriver à ce degré de succulence que, même à Neuilly, on ne trouverait sans doute pas si facilement. Je n’étais pas à Mayotte depuis six mois et je désirais impressionner l’élite sportive locale avec un produit qui ne faisait pas vraiment partie de leur ordinaire. Je me disais que s’ils étaient heureux des talents du chef ils feraient confiance aux conseils de l’entraineur. Ils durent être impressionnés puisqu’à l’issue du repas il ne restait rien du gigot de huit livres ni du kilo de pommes de terre servies avec. Je me souviens avec fierté de leurs mines réjouies, de leurs airs rassasiés, de leurs sourires satisfaits voire béats ; à la couleur près un vrai tableau de Breughel. Il ne restait pas un seul petit bout de viande collée à l’os, pas une goutte de lèchefrite, il ne restait rien vous dis-je et je crois, aujourd’hui comme hier, que si j’avais servi deux gigots au lieu d’un seul il n’en serait pas resté d’avantage.

Mais alors !... Les Mahorais seraient aussi friands de gigot ?!

Il serait intéressant, j’en déduis, d’essayer pendant quelques mois de mettre la viande de gigot au même prix que les mabawas ; juste pour voir. Ou d’offrir, au prix des insipides biscuits fabriqués en Inde, du caviar de chez Ambrossian, des confitures de chez Fauchon ou des chocolats de chez Hédiard et plus tard, mais uniquement lorsque Mayotte sera vraiment département, on essayera le Krug ou le Saint Julien. Si ça se trouve les Mahorais aimeront ça !

Décidément les peuples indigènes se révèlent parfois bien surprenants.

mardi 25 octobre 2011

pour le meilleur et pour le pire




La France fait mal en ce moment. La France réprime, la France impose, la France doute. Le vieux géant s’éteint par sa périphérie.
Le négoce est de plus en plus dur, la force devient argument, les solidarités s’effritent, le doute, la peur peut-être, anesthésient une France qui s’attend à un probable choc. La crise, on en a beaucoup parlé en métropole, on va maintenant aussi la vivre. Comme sans doute tous les pays européens. Faut-il faire un pas de plus ou faut-il s’arrêter ? Faut-il un peu plus de ces règles qui nous ont amenés à cette crise systémique ou en faut-il un peu moins ? Nous faut-il plus de mondialisation ou moins de mondialisation ?

Mayotte est mal en ce moment. Mayotte crie, Mayotte brûle, Mayotte crache. Le vieux volcan se réveille par sa surface.
Mayotte quitte le temps des espérances pour entrer dans celui du négoce. Négocier, pied à pied, négocier négocier négocier. Premier moyen de résister et de survivre. Et ainsi faire voir et entendre ce qui distingue les français de Mayotte des Français de métropole et demander qu’on ajuste à Mayotte un statut particulier parce que Mayotte est particulière. Faut-il faire un pas de plus ou faut-il s’arrêter ? Faut-il un peu plus de ces règles qui ont amené Mayotte jusqu’à la révolte des mabawas ou en faut-il moins ? Faut-il plus de département ou moins de département ?

Mondialisation, départementalisation, même combat. La départementalisation c’est la mondialisation du pauvre. Ce que l’on voit chez l’un on le verra chez l’autre et Mayotte est utile à la France parce que s’il y a un grand soir à Mayotte ce sera la veille d’autres grands soirs en métropole et en Europe. Comme un dernier avertissement.

Mayotte est une ultime expérience dans l’histoire de la France puisque la France a, avec elle, l’occasion de clore son histoire coloniale. Si Mayotte demande : « est-ce qu’on peut discuter ? » la réponse de la République devra toujours être « oui on peut. » Parce que Mayotte est seule et unique de son espèce, oui, parce que c’est la petite dernière, bien sur, parce que plus grande est la puissance et plus grands sont les devoirs, sans aucun doute, mais aussi parce qu’après Mayotte il ne nous sera plus jamais plus donné l’occasion d’accorder nos paroles (liberté, égalité, siècles des lumières…) avec nos actes. Bientôt, très bientôt, après l’effondrement, c'est-à-dire demain, nous ne saurons plus que faire avec le malaise de notre population métropolitaine et nous disposerons alors de fort peu de temps et de ressources à consacrer aux populations éloignées ou marginales. Si la France rate Mayotte il n’y aura plus de rédemption possible.
Pour nous métros le vrai courage ne consiste pas à imposer mais à aménager.

Mayotte n’est pas la Guyane, ni la Réunion, ni la Creuse et les règles qui s’appliquent en Creuse ne se justifient pas nécessairement à Mayotte. Département si on veut mais pas département comme les autres. Pour sa survie Mayotte ne doit pas revendiquer ce qui unit mais ce qui distingue. Parce que Mayotte est le dernier « confetti d’Empire », parce qu’elle est loin, parce qu’elle est toute petite et qu’à ce seul titre elle a le droit de demander d’être traitée de manière différente. Parce que tout le monde à Mayotte commence à se rendre compte que suivre l’Occident partout où il va n’est plus aussi rassurant qu’avant, parce que mettre tous se œufs dans le même panier du seul Mzungu n’est pas une preuve de sagesse et que nous avons le droit, ici à Mayotte et petits comme nous sommes, d’essayer de doubler nos chances. Et pour ce faire regarder aussi ailleurs que vers l’Europe. Il n’est pas question de changer de partenaire, nous demandons seulement le droit d’en courtiser d’autres.
Les règles qui régissent Mayotte lorsqu’elle commerce avec l’Europe ne doivent pas être les règles qui régissent Mayotte lorsqu’elle commerce avec l’océan indien. Les règles qui s’appliquent à l’Europe ne doivent jamais empêcher Mayotte de vivre dans sa région avec , aussi, les règles de sa région.
Pour nous Mahorais le vrai courage ne consiste pas à hurler mais à convaincre.

Je viens d’écrire pour « nous » Mahorais. Pour qui me prends-je ?
Tout comme il existe des Français gros et des Français maigres il existe des Français de métropole et des Français d’Outre-mer. Mayotte est à l’évidence composée de Français d’Outre mer. Il doit donc exister des Mahorais de France et des Mahorais de Mayotte. Je déclare me sentir un Mahorais de France et cette année plus qu’aucune des dix-huit autres que j’ai vécues à Mayotte. Plus il y a de bordel et plus j’ai envie de vivre à Mayotte, c’est ma révélation des derniers évènements. Mayotte donc, pour le meilleur et pour le pire.
Le meilleur aujourd’hui c’est la température, les contacts, les dents blanches partout, l’observation d’un gros village. Le pire est à venir. Kem Gwavenzé*. J’ai envie de contribuer à ce que l’avenir soit moins pire. Qu’il n’y ait pas trop de morts par exemple, voire qu’il n’y en ait pas du tout et je pense que c’est faisable. Toute ma pensée, tout mon travail, tout mon fonctionnement relationnel s’articule principalement autour de l’absolue conviction que la France, un jour ou l’autre ne restera pas à Mayotte et qu’il faut donc que Mayotte s’y prépare. Plus Mayotte se plie et se contorsionne pour rentrer dans le moule que la départementalisation lui tend moins elle se donne à elle-même les moyens de vivre et d’être digne dans les décennies à venir et je pense qu’une très bonne façon de commencer à préparer son avenir c’est encore de dire non à ce qui est imposé de l’extérieur et qui ne nous rapporte rien. Ou qu’avant d’accepter une mesure contraignante on nous laisse regarder autour de nous s’il ne s’y trouve une solution plus avantageuse. On se donnera ainsi les moyens d’échanger non seulement avec les métros mais aussi avec les gens qui nous entourent. Bref on aura un deuxième fer au feu.
L’arrêt de la départementalisation ou/et la renégotiation systématique de tout ce qui reste à mettre en place est, à mon sens le moyen privilégié de démarrer une politique d’émancipation et tant pis si on nous dit que les règles du jeu ne peuvent pas être changées en cours de partie, nous argumenterons et nous argumenterons jusqu’à ce que des modifications soient faites.
Je ne désire pas être le leader ni même l’organisateur d’un mouvement anti départementalisation ; mais j’aimerais qu'il y en ait un et j'aimerais en faire partie.

Bonne soirée à tous.

* « Kem Gwavenzé » veut dire « Inch’Allah » ou « s’il plait à Dieu »

lundi 10 octobre 2011

Mayotte et sa Presse



Curieux tout de même ce rejet de la Presse. Soit on craint qu'elle ne donne une mauvaise image des manifestant(e)s et de leurs revendications, soit on craint qu'elle ne fasse écran entre les manifestants et le pouvoir. Dans les deux cas c'est une gêneuse.

Qu'en était-il en Guadeloupe?

Quelqu'un peut-il me renseigner sur ce point?

Mayotte et sa Presse



Curieux tout de même ce rejet de la Presse. Soit on craint qu'elle ne donne une mauvaise image des manifestant(e)s et de leurs revendications, soit on craint qu'elle ne fasse écran entre les manifestants et le pouvoir. Dans les deux cas c'est une gêneuse.

Qu'en était-il en Guadeloupe?

Quelqu'un peut-il me renseigner sur ce point?

lundi 3 octobre 2011

Revendications


Revendications


Les ailes de poulet sont trop chères et la portion de Brie aussi. Pour les ailes de poulet je veux bien mais la revendication sur le Brie me laisse songeur. Quatre vingt dix pour cent des Mahorais pourraient passer leur vie entière sans manger un morceau de Brie et ne s’en porteraient pas plus mal. Ni ne s’en plaindraient. Mais, et bien plus que les ailes de poulet, le Brie est un symbole de francitude. Plus français que le Brie on a le Camembert et plus français que le Camembert tu meurs. Si on ne mange pas de Brie au moins une fois par semaine c’est qu’on n’est pas français ou que l’on est très pauvre ; deux stigmates dont les Maorais ne veulent pas entendre parler. Bien sur pour être totalement français il leur faudra aussi se plaindre un jour du prix du vin de table mais nous n’en sommes pas encore là. C’est donc non seulement de vie chère dont on parle mais bien de citoyenneté. « Français à part entière » veut nécessairement dire avoir accès à tout ce dont disposent les vrais Français à part entière, ceux de la métropole. Dans le cas contraire on a affaire à de la discrimination. Les Mahorais ne sont pas au bout de leur peine parce que s’il n’y avait que le Brie ! Il n’y a pas non plus encore de taxes foncières ni d’impôts locaux ! C’est pas de la discrimination ça ?

Pendant ce temps là en métropole et sans que quiconque puisse en prévoir la fin, les protections sociales tombent une à une, les salaires baissent inexorablement, l’outil de travail devient de plus en plus désuet, quand il ne fiche pas le camp vers des pays moins regardant en même temps qu’énergie et matières premières se raréfient et deviennent très chères. Nos enseignants se mettent alors en grève, public et privé réunis ce qui est une petite nouveauté ; grève qui ne modère en aucune manière les plans d’austérité prévus ou déjà mis en œuvre. Il y eut grève, puis Châtel sortit de chez le coiffeur, brossa une poussière sur son veston et confirma la suppression à venir de 14 000 autres postes, puis la grève cessa, puis tout le monde reprit le travail et un courageux décret fut pris dans les mêmes moments pour limiter la consommation de frites et de ketchup dans les cantines scolaires. Les Français de métropole râlèrent un peu, se plaignirent beaucoup, doutèrent de tout, profitèrent d’un inhabituellement beau et chaud mois de septembre, et s’apprêtèrent à choisir leur président, juste avant les prochaines vacances d’été, entre un libéral de droite et un(e) libéra(le) de gauche. Pas très pugnaces les métros. Rien à voir avec Mayotte.

C’est qu’en métropole on craint de perdre ce qu’on a tandis qu’à Mayotte on craint de ne pas avoir ce qu’on doit. Les deux populations ne sont pas près de s’entendre. Inévitablement il se trouvera un jour un haut fonctionnaire de passage qui suggérera aux Mahorais de faire preuve de civisme et d’accepter de faire des sacrifices pour participer à l’effort commun de redressement national blablabla etc. J’imagine mal les Mahorais convaincus par ce genre d’argument. J’imagine mal les Mahorais acceptant de payer les dettes contractées par nos banquiers et nos financiers ainsi que les métros l’acceptent en France. Entre la finance puissante et ruineuse et le peuple victime et impuissant nos dirigeants de droite et de gauche ont indiscutablement choisi de faire payer le peuple. Entre Mr Sarkozy et Mme Aubry, tout comme par le passé entre Mr Chirac et Mr Delors il n’y a pas l’épaisseur d’une feuille d’impôt. Nous avons une dette nous devons payer, voila grosso modo l’état d’esprit résigné des métros. Le principe de responsabilité est assurément très noble et joue à plein mais la sacralisation de l’argent est telle que le puissant qui possède la richesse mérite, naturellement, qu’on lui obéisse, même s’il vient de vous ruiner ou s’il s’apprête à le faire. De Gaulle avait raison ; les Français sont des veaux.
Les Mahorais sont français ; les Français sont des veaux ; donc les Mahorais sont des veaux.
C’est vrai ça ?

mardi 13 septembre 2011

Elégance



I’m just back from Amboise. One has to pay nowadays even just to pray in Saint Hubert’s chapel. Thirteen years back one didn’t have to pay until inside the castle itself. The chapel is a stone throw away from the castle. Within the domain but/and on it’s border. This Leonardo would have liked. Touching power and/but not being Power. Leonardo’s remains are buried there.
The first time I was there the visit was for free, it was cold wit something that felt like snow and I had the chapel for myself. Tiny chapel but suitable for hunting parties. In my own head I then asked Leonardo to help me to “tame, master and learn from my body”; my own words. And in my own head the thought sprang up that “the relationship is the same between the body and the soul as it is between man and God” Like an answer. Who knows?...
Thirteen years later I felt like living this experience again and I left my studio in Thouars to go to Amboise. A few hours of driving.
Ten Euros to get in, even if one wants to see just the chapel, a bright sunny crowded day, many British. Or Americans little does matter but a lot of English speaking in the streets. One could hear just English. And quite a number at that, clogging Leonardo’s chapel. A noisy, ill dressed and chicken brained lot. Since I wanted to be alone with Leonardo I waited. And when the chapel was empty I addressed the artist. “All right but from now on, what are we going to do? I’ m painting in black and white, I’m painting with colours, I make things more simple, I make them more complex, I paint on walls and I love it, under water and above water. Fine. But where will my inspiration come from next and what am I to do with what I know?
“Elegance” is the word that sprung to my mind. Like an answer.
One way or another I shall have from now on to behave more elegantly. Whatever that means.
Some work!




Je reviens d’Amboise. Il faut payer aujourd’hui pour se recueillir dans la chapelle de Saint Hubert. Il y a treize ans ils ne faisaient payer qu’à partir de l’entrée du château lui-même. La chapelle est légèrement en dehors du château. Dans le domaine mais en limite du domaine, une place qui, je pense, avait convenu à merveille à Léonard ; touchant le pouvoir mais n’étant pas le pouvoir. Il y est enterré.
La première fois que je suis venu il ne fallait pas payer, il faisait froid, avec quelque chose qui ressemblait à de la neige et j’ai eu la chapelle pour moi tout seul. Petite chapelle au demeurant, mais qui convenait à des rendez-vous de chasse. Dans ma tête je demandai alors à Léonard de m’aider à « maîtriser le corps » ; ce furent mes propres mots. Et dans ma tête encore surgit la pensée qu’ »il y a entre le corps et l’âme le même rapport qu’entre l’homme et Dieu ». Comme une réponse. Va savoir.
J’ai voulu, treize ans après, recommencer l’expérience et j’ai donc quitté mon atelier de Thouars pour aller à Amboise. Quelques heures de route.
Dix euros pour rentrer dans l’enceinte, même si on ne veut que la chapelle, un grand soleil et beaucoup de monde, beaucoup d’Anglais. Ou Américains, peu importe mais vraiment beaucoup d’anglais parlé dans les rues. Pratiquement que ça. Et beaucoup d’entre eux bien sur, dans la chapelle de Léonard. Bruyants, très mal habillés et facilement distraits ; beaucoup plus de femmes que d’hommes. Je voulais être seul avec Léonard. J’attendis donc. Et lorsque la chapelle fut vide je m’adressai au peintre. « Et maintenant », lui demandai-je ; on fait quoi « ? Je fais du noir et blanc, je fais de la couleur, je simplifie, je complexifie, je fais du grand format et j’aime les grands formats, sous marins ou pas sous marins. Très bien mais mon inspiration elle va venir d’où et je fais quoi avec ce que je sais ?!
« Elégance » fut le premier mot qui me vint. Comme une réponse. Il va donc me falloir, d’une manière ou d’une autre, être plus élégant à partir de maintenant.




Y a du boulot !...
Je reviens d’Amboise. Il faut payer aujourd’hui pour se recueillir dans la chapelle de Saint Hubert. Il y a treize ans ils ne faisaient payer qu’à partir de l’entrée du château lui-même. La chapelle est légèrement en dehors du château. Dans le domaine mais en limite du domaine, une place qui, je pense, avait convenu à merveille à Léonard ; touchant le pouvoir mais n’étant pas le pouvoir. Il y est enterré.
La première fois que je suis venu il ne fallait pas payer, il faisait froid, avec quelque chose qui ressemblait à de la neige et j’ai eu la chapelle pour moi tout seul. Petite chapelle au demeurant, mais qui convenait à des rendez-vous de chasse. Dans ma tête je demandai alors à Léonard de m’aider à « maîtriser le corps » ; ce furent mes propres mots. Et dans ma tête encore surgit la pensée qu’ »il y a entre le corps et l’âme le même rapport qu’entre l’homme et Dieu ». Comme une réponse. Va savoir.
J’ai voulu, treize ans après, recommencer l’expérience et j’ai donc quitté mon atelier de Thouars pour aller à Amboise. Quelques heures de route.
Dix euros pour rentrer dans l’enceinte, même si on ne veut que la chapelle, un grand soleil et beaucoup de monde, beaucoup d’Anglais. Ou Américains, peu importe mais vraiment beaucoup d’anglais parlé dans les rues. Pratiquement que ça. Et beaucoup d’entre eux bien sur, dans la chapelle de Léonard. Bruyants, très mal habillés et facilement distraits ; beaucoup plus de femmes que d’hommes. Je voulais être seul avec Léonard. J’attendis donc. Et lorsque la chapelle fut vide je m’adressai au peintre. « Et maintenant », lui demandai-je ; on fait quoi « ? Je fais du noir et blanc, je fais de la couleur, je simplifie, je complexifie, je fais du grand format et j’aime les grands formats, sous marins ou pas sous marins. Très bien mais mon inspiration elle va venir d’où et je fais quoi avec ce que je sais ?!
« Elégance » fut le premier mot qui me vint. Comme une réponse. Il va donc me falloir, d’une manière ou d’une autre, être plus élégant à partir de maintenant.




Y a du boulot !...

I’m just back from Amboise. One has to pay nowadays even just to pray in Saint Hubert’s chapel. Thirteen years back one didn’t have to pay until inside the castle itself. The chapel is a stone throw away from the castle. Within the domain but/and on it’s border. This Leonardo would have liked. Touching power and/but not being Power. Leonardo’s remains are buried there.
The first time I was there the visit was for free, it was cold wit something that felt like snow and I had the chapel for myself. Tiny chapel but suitable for hunting parties. In my own head I then asked Leonardo to help me to “tame, master and learn from my body”; my own words. And in my own head the thought sprang up that “the relationship is the same between the body and the soul as it is between man and God” Like an answer. Who knows?...
Thirteen years later I felt like living this experience again and I left my studio in Thouars to go to Amboise. A few hours of driving.
Ten Euros to get in, even if one wants to see just the chapel, a bright sunny crowded day, many British. Or Americans little does matter but a lot of English speaking in the streets. One could hear just English. And quite a number at that, clogging Leonardo’s chapel. A noisy, ill dressed and chicken brained lot. Since I wanted to be alone with Leonardo I waited. And when the chapel was empty I addressed the artist. “All right but from now on, what are we going to do? I’ m painting in black and white, I’m painting with colours, I make things more simple, I make them more complex, I paint on walls and I love it, under water and above water. Fine. But where will my inspiration come from next and what am I to do with what I know?
“Elegance” is the word that sprung to my mind. Like an answer.
One way or another I shall have from now on to behave more elegantly. Whatever that means.
Some work!

vendredi 2 septembre 2011

just before I go...






I'm going to France on Sunday. I know, Mayotte is supposed to be in France. This is of course a lot of bull; Mayotte is in Africa and so be it. Anyway, I'm going to France on sunday and I'm going to stay there for two months, drinking wine, eating cheese, gorging on chocolates, seeing friends a lot and family a little, spending my hard earned money, why on earth am I doing that, I don't know, I know little, coming to think of it, I just know I feel buggered living in the Comoros but I'd feel worse if I lived in France. Where could help come from????
Well, that's how it is; love to you all and more news to come soon.



samedi 27 août 2011

Just facts (version française en bas de page)

Facts and just facts


Facts. Just plain facts. Easy to check them up. Just come along when I'm painting outside.

We’ve been painting outdoors for a week; just opposite the 5/5 bar, a stone throw from the most congested roundabout in Mamoudzou, right in front of the landing of the ferry, fifty yards away from the covered market place and five days away from the end of Ramadan. Lots of people one way or the other and us in the middle. Two artists working together, I, 63, white, rather rotund, and him, in his late skinny thirties, a cross between a Zimbabwean mother and a Dutch father, and Rasta man on top of that. First fact.

People coming and going give us a fairly good idea of Mayotte; 90% of them are black and the remaining 10 are white. Some of them stop and watch; many don’t.

I’ll be talking only of people who didn’t know us prior their gazing.

Out of ten Wazungu (white folks) who stop by six or seven of them are women and three or four are men.

Out of ten black people who stop by nine are men; perhaps nine and a half.

Out of ten male Wazungu who stop by more than half of them make an appreciative comment on our work; more than that if our eyes meet.

In the case of female Wazungu this proportion is about the same.

Out of ten black males who stop by seven or eight will smile, say hello or/and make an appreciative comment; on condition our eyes meet. Confronted with our paintings they ignore us at worst and show interest at best. At least as long as we don’t mention prices.

Local females, in the same situation, at best look at our work, head turned sideways, while keeping walking; at worst they inspect what we do, toffee-nosed like and still walking and look quickly and ostensibly away as soon as our eyes meet. Ignoring our paintings is not enough; they make sure we see them ignoring us.

Local male worthies (dressed up, fluent French, big car, double or triple lined parking, seasoned habits at the 5/5 bar) treat us about the same way as their women do. Indifferent, vaguely scornful, silent.

Local male bumpkins are easily curious, smiling, mocking in a friendly way and they ask questions.

There’s little difference between young and old males acting, but for the fact perhaps that young male laugh more often. Younger females tend to show more interest than their elders and giggle more.

One last notice; During our week of work we had a good many compliments and friendly words on our painting from plain ordinary people of the street selling type but we haven’t been once approached by an art teacher.

Conclusions of all that? I sure have my own but I keep them for myself. You’ll have to manage with that.

Love to you all.




Des faits ; rien que des faits. Facilement vérifiables ; il suffit de m’accompagner à une séance de peinture en public.


Depuis une semaine nous peignons en public ; juste à la sortie du 5/5, à deux pas du rond point le plus congestionné de Mamoudzou, à la sortie de la barge, à cinquante mètres du marché couvert et à cinq jours de la fin du ramadan. Beaucoup de monde dans un sens ou dans l’autre et nous au milieu. Deux artistes qui travaillons conjointement, moi blanc, soixante trois ans, courtaud et rondouillard, lui, la trentaine maigrichonne, métissé hollando zimbabwéen et rasta de surcroit. Premier fait.

Les gens qui passent à gauche et à droite de nous donnent une bonne idée de Mayotte ; quatre vingt dix pour cent sont noirs et dix pour cent sont blancs. Certains s’arrêtent, beaucoup ne s’arrêtent pas.

Je ne parle ici que des gens qui ne nous connaissent pas et qui s’arrêtent quand même.

Sur dix wazungu qui s’arrêtent six ou sept sont des femmes, trois ou quatre sont des hommes.

Sur dix noirs qui s’arrêtent, neuf sont des hommes ; peut-être neuf et demi.

Sur dix wazungu mâles qui s’arrêtent plus de la moitié fait un compliment sur le travail ; plus si nos regards croisent les leurs.

La proportion est à peu près la même si les wazungu sont des femmes.

Sur dix hommes noirs qui s’arrêtent sept ou huit vont faire un sourire, un bonjour ou/et un compliment. Même s’il n’y a pas communication visuelle.

Sur dix femmes qui s’arrêtent une, quelque fois deux vont faire un hochement de tête ou un compliment. A condition qu’il y ait échange de regards.

Confrontés à nos tableaux les hommes d’ici, au pire nous ignorent et au mieux s’y intéressent aimablement. Du moins jusqu’à ce qu’on leur parle du prix.

Dans la même situation les femmes d’ici, au mieux regardent les dessins qu’on a fait, la tête sur le côté, tout en continuant à marcher ; au pire détaillent les tableaux en levant le nez et regardent ostensiblement ailleurs sitôt qu’elles nous voient les regarder. Ignorer nos tableaux ne suffit pas ; elles nous font voir qu’elles les ignorent. Le prix n’est même pas discuté puisque le tableau, s’il les intéresse, doit leur être offert.

Les indigènes mâles faisant partie de l’élite (bien habillés, français correct, grosse voiture, bureau secondaire au 5/5, parking en double ou en triple file) ont à peu près le même comportement que leurs consœurs, que celles-ci fassent ou non partie de l’élite. Indifférents, vaguement méprisants, pas loquaces.

Les indigènes mâles du tout venant, les gens simples et les ploucs sont quant à eux curieux, souriants ou goguenards, et poseurs de questions.

Les jeunes femmes et jeunes filles semblent plus intéressées par nos dessins que leurs mères ; quel que soit le statut.

Peu de différence entre les jeunes hommes et les plus vieux, sinon peut-être que les jeunes se marrent davantage.

Une dernière remarque. En cinq jours nous avons eu beaucoup de réflexions aimables sur notre travail, de la part des gueux, des va nu pieds, des matsaha vendeurs d’oignons ; nous n’avons par contre été approchés par aucun prof d’arts plastiques.

Les conclusions de tout ça ? J’ai les miennes bien sur ; je ne vous en fais pas part ; pas pour l’instant. Débrouillez-vous avec ça.



samedi 13 août 2011

underwater raving


English title and English text. So there. All in consideration for my good old Australian mate Rod. He used to speak a little French thirty five years ago but lost it all in oblivion. Something to do with old age, maybe, and total lack of practice, surely. Anyway I'm going to write in English for some time from now on. See what happens. It should keep my English in shape in any case. And please my Australian fans. As for the other ones, the ones who speak French and only French, they have been treated very weel I should think for the past four years and they have treated me with so few nice and encouraging comments in return that I honnestly don't care that much for what they're thinking of me for the moment. Let them simmer a while in their own rancid juice; that'll teach them. If they fell on their knees and implored me to switch back to a language they coul understand, or, better still if they wrote me a cheque I'd see what I could do. But since the French have been giving me the irrits for some time French will now wait for a while and that's how it is.

Well, as everyone can see, this picture is an underwater painting. Nowhere else could one see fish but underwater and that's proof enough. It hasn't been done underwater but in my studio, after I saw something vaguely looking like that composition during one of my underwater frolics. All I had to do back home was to reproduce the shape as best as I could, with a lot of clear and dark blue, using palette knives instead of soft brushes, add some fish, naturally, and there we are.

Curiously I'm not that good at making above water landscapes in such an imaginative way. For me a tree is a tree and should damn look like a f... tree, while a piece of rock or a chunk of coral can look like just about anything I please provided it looks good. I feel freer (or is it more free ?) with underwater stuff. The subject I paint doesn't matter so much; it's what I feel that matters.
I can't do it all the time though; I'm not that free and besides people who buy paintings around here want pictures that remind them of what they liked best during their stay in Mayotte and I need their money.

The Comoros underwater and the Comoros above waters... Story to be continued. See you soon.


dimanche 31 juillet 2011

peinture sous marine




Voilà ce que donne le premier essai. Une toile de 45 cm x 55 recouverte de peinture après 55 minutes sous l'eau, soit 40 minutes de travail effectif. Pas de préparation de couleur préliminaire, le mélange ses tons se faisant sur la toile elle même, et avec les doigts seulement puisque les pinceaux raides et surtout les couteaux à peindre enlèvent autant de peinture qu'ils n'en appliquent. L'ensembe ressemble à un travail fait par un enfant de quatre ans. La prochaine expérience (la semaine qui vient) me permettra de régler le problème de la palette et donc de préparer mes couleurs avant de les mettre sur la toile, ce qui devrait permettre d'être un peu plus juste et d'aller à un stade plus avancé.

Ceci dit je ne vois encore pas très bien ce que, du point de vue du métier, peindre sous l'eau peut vraiment m'apporter. La satisfaction de pouvoir le faire, oui; la satisfaction de peindre dans des conditions différentes que celles rencontrées par le peintre moyen, le "fun" en d'autres termes, la satisfaction également d'avoir pu faire plaisir à une équipe, et celle du Nyamba club aura été particulièrement enthousiaste et sympathique; mais je ne trouve sous l'eau ni les couleurs vives et chaudes que j'affectionne, ni surtout les contrastes. Par contre je vais sans doute investir dans un appareil photo qui me permette de saisir tout ce qui me fascine dans le monde du silence, à savoir l'infinie variété des formes, des matières et des textures, lesquelles suscitent l'envie de faire mille et une compositions. La couleur, la lumière, les contrastes, ma foi, j'en ferai mon affaire une fois revenu à l'atelier. Histoire à suivre donc.


peinture sous marine



lundi 11 juillet 2011

aristocratie


"Les oeuvres d'art sont les lettres de noblesse de la seule aristocratie, celle qui a ses ancêtres devant elle." RAINER MARIA RILKE

Je n'ai jamais rien lu de Rilke mais je sens que je vais m'y mettre parce qu'une phrase comme celle là c'est exactement ce que de temps à autre j'ai besoin d'entendre; et de croire.

Je me suis fais traiter d’égoïste, plusieurs fois, par une aristocrate locale, importée, adjonction à une grande famille autrefois un petit peu régnante, fascinée par le verbe, familière des réseaux, érudite de grande stature, imprégnée d’humanisme et de sens de l'histoire mais hélas toute entière tournée vers la politique, le politique, les politiques, bref, et surtout ici, tout un petit monde jacassant, complaisant et imbu de sa descendance d'ancêtres qui furent sinon grands, du moins au dessus de la plèbe qui les entouraient. Aristocrates poil aux pattes mal remis de leur déchéance et ressassant sous toutes les formes au mieux la tristesse, au pire la rancœur de ne plus pouvoir imposer à leurs féaux les volontés et le pouvoir que leur avaient concédés leurs maîtres.
En quoi leur égoïsme se distingue-t-il du mien, qui veut construire, qui veut léguer, qui veut faire œuvre? Rilke à la rescousse! qui donne à l’œuvre statut de lignée et fonction génitrice. Que Dieu le bénisse!

Rembrandt était égoïste, et Picasso et Michel Ange et Hokusai... S'ils ne l'avaient été qui se souviendrait d'eux? Et quelle influence auraient-ils eue dans le changement du regard des hommes sur le monde? Siècle après siècle la politique n'apporte rien; elle ramène les sociétés au même point de départ, celui du désordre qui rend la politique possible. Siècle après siècle l'art a au moins le mérite d'inventer et donc de découvrir en permanence. Au sommet de son influence un politique est un despote; au sommet de son art un artiste est un maître. La dynastie fondée par Léonard survit encore aux Médicis.

Monsieur Rilke, merci

lundi 30 mai 2011

succès


L'expo est un succès.
Merci à tous ceux qui ont suivi mon travail et qui m'ont encouragé; ceux qui ont cru en moi alors que je cédais. Pardon à ceux avec lesquels je fus trop vif. Mon travail plait, mon travail se vend; je suis en paix.

mercredi 18 mai 2011

Plus que deux


Oui je sais, ça devrait être "plus qu'un"; mais il va y en avoir un de plus. Donc après celui-ci il en restera deux. C'est comme ça.

mercredi 11 mai 2011