Jour 1
1er septembre 2015
Bon
eh bien la preuve est faite, les jours se suivent et ne se ressemblent pas.
Hier tout allait mal et aujourd’hui tout alla bien. J’ai posé les dessins de
deux tableaux sur le mur de l’alliance, les deux autres seront posés dans les
deux jours qui viennent. Tout s’est bien passé, signifiant que j’ai fait ce que
j’ai voulu et que je ne prévois pas de difficultés particulières. C’est tout de
même curieux, et rassurant à la fois de constater qu’au sein d’une vie aussi…
disons chaotique que la mienne il existe une zone protégée, un imprenable fort
ceint de douves repoussantes à l’intérieur duquel règne sans partage un ordre
immuable, cet ordre qui me permet de ne jamais manquer du plus infime matériel
de dessin ou de peinture, alors que j’oublie très souvent la liste des courses
et toujours les dates d’anniversaires, ce même ordre qui me fait placer ma
palette et mes pinceaux, mes cotons tiges et mes tubes de couleurs, mon torchon
et ma bouteille de médium à peindre aux mêmes endroits de ma table de travail, qu’il
fasse jour ou qu’il fasse nuit, qu’il pleuve ou non, que je peigne à Angers, à
Mutsamudu ou à Cavani. J’ai pu ce matin, sur la terrasse de l’alliance, dans un
pays sans eau ni électricité ni communications fiables, j’ai pu donc, recréer
le même univers que celui dans lequel je me vautre sitôt réveillé, univers
qu’il me peine de quitter même pour chercher le pain, le seul finalement en
lequel je me sente en absolue sécurité. Non bien sûr, pas exactement le
seul ; je connais, ou j’ai connu, ne nous vantons pas, quelques paires de
fesses qui offraient ce même mélange de sentiment de sécurité et de sentiment
d’avoir, enfin, réussi à maîtriser son sort.
Tranquille
donc à l’alliance, et d’autant plus tranquille que je savais qu’à la fin de la
journée je pourrais me laver et dormir dans un endroit beaucoup plus aimable
que celui dans lequel j’étais tombé la veille. Relax Marcel, tu le vaux bien.
Personne
au surplus n’est venu me déranger. Deux ados timides m’ont dit qu’ils étaient
des jeunes artistes avant de s’asseoir derrière moi et me regarder faire. L’un
d’eux est bien resté une bonne heure. Aucun n’a posé de question. La grande
majorité des gens qui passent s’en fichent totalement semble-t-il. Il va être
intéressant de voir si les réactions des habitués changent à mesure que le
travail avance.
Histoire
à suivre donc et on se revoit demain, ou après-demain, cela dépendra grandement
des facilités que nous dispensera Comores Telecom.
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