lundi 22 juin 2009

gueule de bois; lendemain d'expo

Moustoifa

Racines

Pas un mahorais, ni bien sur une mahoraise. Une poignée d'anjouanais avec leurs épouses métro et quelques comoriens faciles à trouver parmi les cadres de Sandragon.J'aurai passé seize ans à Mayotte, enseigné quatre ans à deux douzaines de classes, j'aurai aidé à s'entraîner cinq équipes de foot, dont une hissée à la division supérieure à la fin de la saison, j'aurai peint plus de 800 tableaux en seize ans et je n'ai vu hier soir pas un ancien ami, pas un ancien élève, pas un ancien footballeur. Beaucoup m'avaient promis; croix de bois croix de fer, sur la tête de ma mère, aucun n'a tenu. Nous sommes à Mayotte. Indubitablement.

Très peu de questions; pas une demande d'interview. L'intérêt des médias diminue d'année en année. Pas un journaliste de RFO non plus, ni de radio ni de télé. Soixante tableaux correctement exécutés, ce qui partout est rare, sérieusement et individuellement encadrés, ce qui est encore plus rare, présentés dans un endroit vaste, lumineux et passant, rarissime dans toute la région et pas si fréquent ailleurs et croyez-vous que les ronds de cuir incapables de RFO se soient fendus d'un seul coup de fil? D'une seule question? D'une seule visite? RFO est composée de fonctionnaires incultes vantards et inamovibles. Quelle intelligence, quelle idée nouvelle peut-on trouver dans un panier pareil.

Pas un membre de l'intelligentsia locale, ni du côté de la préfecture ni du côté de la collectivité. Et ne s'est pas fait connaître un seul professeur d'arts plastiques. Décidément les élites ne m'aiment pas. Ont-elles plus de goût que moi? C'est pas gagné. -La seule bonne chose de la soirée c'est que, tétanisés sans doute par la munificence de la prestation ils sont restés sans voix et, pour la première fois peut-être aucun de ces discoureurs inutiles n'est venu me faire des critiques ou me donner des conseils
(pour mon bien)

Deux solutions ce soir 1-- je suis nul et ça doit se voir puisqu'aucun membre de l'intelligentsia cultivée ne me courtise.

2 --Les nuls ce sont les autres, tous ceux et celles cités plus haut

Ce sont les niais bien sur qui ont tort mais même cette éblouissante vérité ne suffit pas à me rasséréner. Je suis fatigué, vraiment fatigué.

J'envisage aujourd'hui très sérieusement de quitter Mayotte, une île où je n'aurai jamais connu d'attaches, où je n'aurais entendu que des exigences, connu que des déceptions, des fanfaronnades, des trahisons. Une île peuplée à 98% d'enfants gâtés et envieux qui passent du temps à nous dire qu'ils ont souffert alors qu'ils n'ont jamais vraiment souffert puisqu'ils n'ont jamais eu moins d'une année sur l'autre. Souffrir ce n'est pas ne pas avoir (réflexe d'enfant capricieux); souffrir c'est avoir eu et ne plus avoir. Il suffit de demander aux voisins. La maturité des peuples passe peut-être par là.
Je suis fatigué de lutter seul alors que me quitte progressivement tout espoir de pouvoir transmettre ce que je sais au premier volontaire venu. Ce que je suis ne séduit plus; ce que je fais ne séduit pas. Il est temps de songer à partir. J'ai envie de dormir longtemps, longtemps; le plus longtemps possible


ruelle de Mutsamudu



la femme en jaune

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Notre artiste préféré est fatigué de son ouvrage. Depuis quatre mois , il travaille dur et longtemps. C'est le baby spleen qui suit l'accouchement.
Quant à la reconnaissance de l'établissement, faut-il la rechercher ?
La fidélité, Marcel, est une valeur purement judéo-chretienne. Il n'est rien de plus normal ici que ceux que tu as cotoyé ne soient pas tentés par une boufée de nostalgie. Retiens ceux qui sont venus,ils étaient nombreux;ils ont apprécié et parfois ont été acheteurs. Et puis j'ai vu un mahoro-comorien, jeune, inculte et footballeur amateur venir simplement pour découvrir ta peinture.

sonja a dit…

Bonjour
L'important surtout, ce sont ceux qui ont pu se liberer pour être présent à ce vernissage.
Sans doute faut-il garder à l'esprit non pas que le verre et à demi-vide , mais plutôt qu'il est à demi plein.
J'aime bien ta toile représentant le chanteur aveugle dans son environnement. Ainsi que le portrait de l'homme, juste au debut de ta page...
J'ai essayé de m'inscrire à ta newletter, mais je n'ai pas vu d'emplacement à ce propos. A moins que je l'ai loupé. Je retourne voir dès que j'envois mon message
A un autre jour sans doute
Bonne soirée ou journée.
Pensées amicales

sev et François a dit…

Salut Marcel,
Ben nous on a bien aimé l'expo ! On n'est ni journaliste, ni huile de Mayotte, mais voilà on aime et on en parle. Ca a sans doute moins d'impact, mais ça fait toujours plaisir de partager ce que l'on découvre avec d'autres personnes. Et personnellement, découvrir tes peintures, et contempler tous les jours "Ramadan" est un réel bonheur.
Alors merci.

Frank a dit…

Je n'ai pas pris le temps de prendre du temps.

Il me plairait assez d'user un morceau de parping et d'y consommer une bière bien fraîche.

Eric m'a parler d'un séjour en anjou, es-tu déjà venu ?

Que dirais tu d'un verre de rosé de loire à l'ombre d'arbres angevins.

PS: A.Bashung
On dirait que sans les poings on est toujours aussi balèzes

sev et François a dit…

Salut Marcel,
J'attends de vous lire.