lundi 1 septembre 2008

encore des vaches



Toujours dans la série des vaches laissez-moi vous présenter Voie Lactée, la reine de la nuit, et psy-cow, qui a trouvé un carré d’herbe sympa à côté de son champ de luzerne habituel qui ne s’en n’est pas plaint et qui ne l'a dit à personne d'autre.



A la suite d’une question posée sur le nom à donner à la plus noble de mes vaches (voir articles précédents), on m’a suggéré de l’appeler « Vermeer, en l’honneur de la peinture et de la laitière ». Le rapprochement est élégant, l’attention est indiscutablement aimable et j’y suis sensible, mais je vois trois objections opposables à la suggestion de Lunembul (2), trois objections dont une seule malheureusement suffirait à interdire à mon aristocratique zébue de porter ce nouveau patronyme.
Tout d’abord Vermeer était un homme et ma belle zébue est une femelle. Cette fois-ci j’ai bien regardé et je suis sûr de ne pas me tromper. Une vache dont tout le monde dit, de Tsingoni à Vahibé, que c’est l’unique et la plus belle ne peut s’appeler Johannis. Imaginons l’inverse ; un taureau jeune et fier dont on voit de l’autre bout du champ que c’est bien un taureau. Le nommera-t-on Yvonne ? Ou Huguette ou Catharina, prénom de Madame Vermeer ? Imagine-t-on Manolete portant l’estocade à Madonna ou El Cordobes obtenant les oreilles et la queue de Lady Di ? Non, vraiment, la laitière est une bonne idée, mais Vermeer ne convient pas.
La deuxième objection est moins rationnelle mais elle est tout aussi impossible à écarter. Ma vache a des cornes et je n’imagine pas une seconde en faire porter à Vermeer. Baudelaire, que je plagie volontiers, avait ses phares ; moi j’ai les miens, il se trouve que Vermeer est l’un d’eux, et on ne me fera jamais mettre des cornes au front d’un de mes peintres adorés. Peut-être Catharina s’en est-elle chargée. Je ne veux pas le savoir. Vermeer n’aura pas de cornes un point c’est tout. Aurions-nous à faire à un veau qu’il ne s’appellerait pas davantage Vermeer, ni Rembrandt, ni Caillebotte. Le sujet est donc clos.
La troisième objection tient au public qui doit choisir le nom de ma jolie vachette. Il s’agit du personnel de LdM, c'est-à-dire de la laiterie de Mayotte, composé à 95% de Mahorais. C'est-à-dire de Comoriens. C'est-à-dire de gens qui, en peinture, n’y connaissent rien de rien et qui s’en foutent complètement. Au risque de choquer, et peut-être même y trouvé-je plaisir, j’écris « Mahorais donc Comoriens » parce que sur le sujet de la peinture, Mahorais et Comoriens c’est un seul et même combat. Tout le monde s’en fiche à l’unanimité. Brassens n’aurait pas dit autrement. On connaît Picasso parce qu’il s’en vend à la SMCI(1), on sait que da Vinci a ramené un maximum de tunes à un mec avec une histoire de code mais là s’arrête à Mayotte la culture du dessin. Et nul ne pense à la porter plus loin. Pour quoi faire ? Quel est l’intérêt d’un tableau ? A Ngazidja (Grande Comore) il existe un excellent peintre, qui fait de l’abstrait mais ce n’est pas grave il est très bon quand même, il s’appelle Modali ; il est suivi par quelques autres qui sont peut-être prometteurs, l’avenir le dira, tous loin derrière le maître ; à Ndzuani (Anjouan) et à Mwali (Mohéli) je n’en connais pas, et à Mayotte les seuls qui peignent à temps complet sont des importés. Deux métros et un métis africano-batave. Pas un Mahorais. « Il faut encourager les artistes ! Donnez-nous de l’argent et on vous trouvera des artistes ! Que fait l’Etat ? Que fait le ministère de la culture ? Le Conseil général ? Que fait le directeur des affaires culturelles ? (Ca c’est une bonne question) On veut des subventions ! » Les sous d’abord, le travail après, Inch’Allah. Mouais. Si on veut. Pas sûr que ça marche.
« Ca va venir » nous dit-on ; on nous le dit aussi à propos de beaucoup d’autres choses. . Peut-être le goût des arts, plastiques et autres, viendra-t-il après que Mayotte soit département, comme le goût d’être à l’heure, de rendre les outils qu’on emprunte ou d’attendre son tour au guichet de la Poste ; peut-être que oui peut-être que non, mais pour le moment l’intérêt porté au dessin et à la peinture est proche du zéro absolu et tout indique, selon moi, qu’il va y demeurer.
Il existe pourtant un moyen d’intéresser la jeunesse de Mayotte (et des Comores) à la peinture et au dessin et il est fort simple ; je le suggère à Lunembul (2) pour le jour où il sera président de la France toute entière, et donc aussi de Mayotte. Il n’est d’ailleurs pas nécessaire d’être président ; c’est à la portée de quiconque veut rentrer dans l’histoire du mécénat et y prendre la place de Jules II. Il lui suffit de m’acheter un joli 4x4, adapté à la région, une Porsche Cayenne par exemple, rouge de préférence, ainsi que la Rolex et les Ray-Ban qui vont avec. Et lorsque, pour faire l’emplette de mes fusains ou de mes toiles j’irai à Jumbo ou à la Maison des livres en un tel équipage, alors les jeunes d’ici commenceront à s’intéresser aux arts plastiques.

(1) la SMCI est à Mayotte un revendeur automobile
(2) « lunembul » possède un blog qui s’appelle « l’envol de la baleine » et de temps en temps il se permet des petites réflexions…

1 commentaire:

lunembul a dit…

"Tout d’abord Vermeer était un homme et ma belle zébue est une femelle".
Certes,
mais...
... La laitière est un tableau 'profondément' mystique, apprécions au passage le 'profondément'. La vache dont il est question a un air tout aussi profondément méditatif, on SENT qu'il se passe quelque chose, du mystique, une conversion peut-être ?
Donc cette zébue est mystique, et, tous les mystiques le diront, ni mâle ni femelle en ces lieux. D'où je peux affirmer que l'objection ne tient pas.
Par contre je suis assez d'accord pour ne pas avoir à couper les oreilles et la queue de Lady Di. Sauvé, je ne suis pas Manolete...

Je propose de l'appeler Sainte Thérèse puisqu'elle est mystique.